Guindo Abdoulaye

Mali : Les institutions en totale insécurité

Que fait l’Etat du Mali pour protéger ses ministres contre d’éventuelles attaques jihadistes ? La question vient en tête aussitôt que l’on songe au climat d’insécurité qui règne au nord, avec des accès de fièvre au centre comme lors des récentes attaques armées enregistrées à Téninkou et Nampala, loin du théâtre de guerre du nord. Il y a d’autant plus lieu à s’interroger qu’il y a quelques mois seulement, au nord, le ministre de l’Emploi, Mahamane Baby, a échappé de peu à un enlèvement et que le convoi du ministre du Développement Rural, Bocary Tréta, a sauté sur une mine vers Goundam. Ayant cherché à savoir de quoi il retournait, nous avons interrogé plusieurs sources.

Il ressort de notre enquête que tout ministre à droit à une garde rapprochée composée d’un garde du corps. Pour sa garde rapprochée, est affecté à chaque ministre un élément de la police ou de la garde nationale proposé généralement par le ministre lui-même en raison de ses affinités personnelles avec l’élément en cause. Il arrive que le ministre choisisse un ami, un parent, un voisin ou, tout simplement, qu’il reconduise l’élément qui servait sous son prédécesseur. Ainsi, Kénékéou Barthélémy Togo, actuel ministre de l’Education Nationale, a reconduit dans ses missions l’agent de police qui servait sous ses prédécesseurs Salikou Sanogo et Jacqueline Togola. L’agent de police reste collé aux basques du ministre toute la journée de travail; une fois que le ministre rejoint sa résidence, l’agent rentre lui aussi chez lui en attendant de retrouver le ministre le lendemain matin.

La garde du domicile du ministre n’est réglementée par aucun texte légal. Elle revient au ministre lui-même. Cependant, certains ministres, du fait du caractère stratégique de leur poste, se voient affecter, d’office ou à leur demande, un péloton de la police ou de la garde nationale: c’est notamment le cas des ministres de la Justice, de la Défense et de la Sécurité. D’autres ministres peuvent obtenir d’office une garde à domicile en raison des menaces qui pèsent potentiellement sur eux: c’est, par exemple, le cas de Zahabi Ould Sidi Mohamed, un rebelle repenti devenu minitre de la Réconciliation Nationale. Il arrive aussi qu’en raison de circonstances exceptionnelles, tous les ministres obtiennent d’office une garde policière de 3 ou 4 éléments à leur résidence: c’était le cas sous la Transition où tout officiel pouvait à tout moment recevoir des visites indésirables et musclées. Mais en temps normal, chaque ministre est responsable de la sécurité de sa propre résidence.
A cette fin, les ministres ont le plus souvent recours aux services de sociétés privées de gardiennage. « Certes, la police a une force de dissuasion plus grande car elle porte un uniforme officiel et est armée; mais le recours aux sociétés privées de gardiennage a plusieurs avantages: les agents privés ont une conscience professionnelle plus grande; de plus, l’agence privée de sécurité est rémunérée par le ministère, ce qui donne au ministre la possibilité de jongler avec les chiffres ou d’apporter un marché à un proche », nous confie une source.
De surcroît, certains ministres se gênent de poster à leur porte des éléments de police, de crainte de se voir reprocher un éloignement du peuple. C’est pourquoi plusieurs ministres, généralement venus du sérail politique, ont refusé la présence de la police à leur résidence. D’autres ministres craignent qu’une fois chassés de leur poste, la police ne quitte leur résidence, leur attirant, du coup, les moqueries des voisins.
Notons que certains anciens ministres bénéficient d’une protection policière de leur résidence en raison des menaces qui planent sur eux: le plus connu est sans doute Mamadou Namory Traoré. Actuel conseiller à la primature, il avait eu, sous la Transition où il dirigeait le ministère de la Fonction publique, la mauvaise idée de licencier 260 fonctionnaires au motif qu’ils avaient été illégalement recrutés. Bien que sa décision ait été plus tard annulée par la Cour Suprême et fonctionnaires réintégrés, l’ancien ministre ne dort plus que d’un œil.
En définitive, il y a lieu de craindre pour la sécurité de la plupart des ministres maliens. Avec les gardes privés recrutés à leur domicile, ils constituent une proie aisée pour tout jihadiste qui déciderait de frapper un grand coup. Les gardes privés ne sont généralement équipés que d’un uniforme, d’un bâton et d’un sifflet (pour appeler, en cas ‘urgence, au secours). C’est l’occasion de se demander quelle rançon serait alors demandée à l’Etat malien. D’ailleurs, que font la police et l’armée qui les empêche de se déployer au domicile de tous les ministres ? Le comble, c’est que le directeur de la police a récemment adressé au ministre de la Sécurité un courrier où il suggère d’arrêter le service des policiers à la résidence de certains ministres. La raison invoquée par monsieur le directeur ? Ne pas gêner les autres activités de la police qui, selon son chef, n’aurait pas d’effectifs suffisants !


Au pays d’IBK, force reste à Allah et au prophète Mohamed (PSL)

Comme au Niger, au Sénégal, en Algérie, en Iran ou au Pakistan, les fidèles musulmans ont battu le pavé à Bamako, vendredi 16 janvier 2015, à l’appel du collectif des associations islamiques, pour protester contre les caricatures du prophète Mahomet (paix et salut sur lui), parues dans le journal français Charlie Hebdo le 14 janvier 2015.
Le gouverneur interdit, le premier ministre autorise

Comme la réglementation le prévoit, les organisateurs de la marche ont, avant toute chose, adressé une demande d’autorisation à Hady Traoré, gouverneur du district de Bamako. Dans sa réponse en date du jeudi 15 janvier 2015, le gouverneur refuse d’autoriser la marche par crainte des risques de débordements. Selon nos informations, le gouverneur, avant de prendre sa décision, se serait référé à sa hiérarchie, c’est-à-dire au ministre de l’Administration territoriale, qui lui aurait instruit de rejeter la demande.

Immédiatement après le rejet de la demande, les responsables du collectif prennent langue avec le premier ministre Modibo Keita en personne. A celui-ci, ils signifient que le droit de marcher est un droit constitutionnel. Après quelques heures de tractations, ce même jeudi 15 janvier 2015, le premier ministre appelle Mahmoud Dicko, président du Haut Conseil islamique, pour l’informer de sa décision d’autoriser la marche, à la condition que les uns et les autres veillent à la sauvegarde de l’ordre public. En l’occurrence, le premier ministre fait montre de responsabilité, car si l’Etat avait maintenu son refus, les associations islamiques auraient passé outre. Mahmoud Dicko appelle à son tour Mohamed Kimbiri, porte-parole du collectif, pour l’informer de la décision. Le spot publicitaire de la marche, qui avait été mis au placard suite au refus du gouverneur, reprend sa diffusion sur les radios privées de Bamako. Le vendredi 16 janvier 2015, jour de la marche, l’information est encore donnée dans la plupart des mosquées de la capitale.

Slogans hostiles

Avant 16 heures, heure prévue pour la marche, environ 10 000 personnes prennent d’assaut la devanture de la Bourse du Travail, lieu de départ de la manifestation. Sur les pancartes, on peut lire les slogans suivants : « On s’en fout de Charlie ! On ne sera jamais Charlie! », « Gare à celui qui se moque du prophète ! »,  » Je suis Coulibaly, je suis Kouachi, mort à Charlie ! « Oui à la liberté d’expression, non à la caricature de notre prophète! », « Aucun musulman sincère n’est Charlie ! ». Une pancarte ne passe pas inaperçue; elle mentionne : « IBK est Charlie et le peuple n’est pas Charlie! »

Le signal du départ donné, les marcheurs, sous bonne escorte des forces de l’ordre, se ruent vers le monument de l’indépendance où les attendent le président du Haut Conseil islamique, Mahmoud Dicko; le guide spirituel de l’association islamique « Ansar Dine », Chérif Madani Haidara; Mohamed Kimbiri, etc. Sur la courte distance qui sépare la Bourse du Travail du monument de l’indépendance, les marcheurs ne mettent que 5 minutes. A leur arrivée au monument, ils sont harangués par le maître de cérémonie, Kimbiri, qui prend la parole pour annoncer le programme. Pour bénir, le meeting, un certain Abdramane Sénou procède à la lecture de quelques versets du Coran.

Ensuite, Ousmane Madani Haidara souhaite la bienvenue aux marcheurs. Dans son adresse, il dira que cette marche a pour but de protester contre les caricatures du prophète Mohamed (paix et salut sur lui) publiées dans le journal français Charlie Hebdo. Selon Haidara, personne n’aimerait se voir humilié dans un journal, à plus forte raison le prophète (psl) grâce auquel chaque croyant espère aller au paradis. L’orateur affirme que les musulmans du Mali ne sont pas des terroristes et ne le seront jamais, mais qu’ils réagiront à toute attaque contre le prophète Mohamed (psl).

Le discours du président du Haut Conseil islamique va dans le même sens. Mahmoud Dicko, d’entrée de jeu, remercie les fidèles musulmans pour leur mobilisation. A ses dires, le nombre de manifestants est la preuve de l’attachement du Malien à sa religion. « Ce rassemblement est un signal envoyé au monde entier pour dire que les musulmans maliens sont prêts à mourir pour le prophète Mohamed (paix et salut sur lui) ». Dicko rappelle la reconnaissance éternelle du peuple malien envers la France pour tout ce qu’elle a fait pour le Mali. Si le peuple n’a pas cru utile de s’opposer à la participation du président IBK à la marche du 11 janvier 2015 à Paris, qui était une « marche contre l’obscurantisme », il n’accepte pas, en revanche, les nouvelles caricatures publiées après la marche.

La dimension planétaire donnée à ce numéro de Charlie Hebdo ne contribue pas, selon l’orateur, à rapprocher les peuples. « Le monde a aujourd’hui besoin d’un rapprochement des peuples et des religions, mais ces comportements ne sont pas de nature à aller en ce sens », déplore Mahmoud Dicko. Il trouve les caricatures « choquantes et génératrices de haine entre les musulmans et la France ». La liberté d’expression, certes, mais pas de caricatures du prophète (psl) ! « L’islam est l’essence de notre vie et le prophète Mohamed (psl) est l’essence de cette religion. Par conséquent, nous condamnerons toute forme d’attaques contre lui », conclut d’une voix sombre le patron du Haut Conseil islamique.

 


Djidjan, cercle de Kayes : Les tuyaux de cyanure de la société minière SOMILO éclatent: Les villageois menacés de mort

Dans notre denier billet, nous évoquions la pollution de la localité de Djidjan-Loulo (cercle de Kayes au Mali) par la société d’exploitation minière dénommée « SOMILO ». Dans cette localité, les tuyaux par lesquels passent le cyanure et le plomb utilisés dans le traitement de l’or sont installés en plein cœur de la ville; ils constituaient, de ce fait, une véritable bombe à retardement. Il faut savoir que dans le cadre du traitement des minerais, certains produits très mortels comme le cyanure et le plomb sont utilisés dans les mines; à la fin de la chaîne de traitement, ces produits passent par des tuyaux vers un déversoir final.
A Djidjan-Loulo, les tuyaux par lesquels passent les produits hautement toxiques traversent le village à ciel ouvert. Les enfants risquaient leur vie tous les jours en jouant près desdits tuyaux. En vue de prévenir l’extermination chimique du village suite à une éventuelle perforation des tuyaux, les populations de Djidjan-Loulo, à plusieurs occasions, avaient tiré la sonnette d’alarme en sollicitant le retrait des tuyaux. A travers des correspondances adressées aux autorités locales et nationales, y compris le Premier Ministre, la communauté de Djidjan avait haussé le ton. En vain.
Puis, ce qui devait arriver, arriva. Depuis le jeudi 9 octobre 2014, les tuyaux, à maints endroits, ont éclaté. Les populations assistent, impuissantes, à la coulée du cyanure et du plomb dans le village (voir photos). Cette situation a coupé le village en deux.
En effet, lorsque la vapeur du cyanure tue, de même que la moindre goutte de ce produit. Les habitants ne peuvent donc quitter un quartier riverain des tuyaux vers un autre sans risquer de se faire empoisonner par le cyanure. L’activité économique du village est, par conséquent, au ralenti; les bergers voient leurs animaux mourir çà et là. Plus grave encore, tous les puits fournissant l’eau potable ont été abandonnés car tous pollués. Les habitants de Djidjan les plus riches ne consomment plus que de l’eau minérale. Ceux qui n’ont pas les moyens de s’acheter ce produit de luxe sont obligés de consommer l’eau de puits à leurs risques et périls. Les citoyens souffrant de maux de ventre se comptent par dizaines. Ils se plaignent aussi de diarrhées.

 
Pour les habitants de Djidjan-Loulo, les autorités nationales sont les premiers responsables de leur extermination programmée. Après que la direction de la SOMILO eut affirmé qu’elle payait une taxe à l’Etat pour exercer librement ses activités et qu’elle n’enlèverait les tuyaux que sur ordre de l’Etat, la communauté de Djidjan-Loulo n’avait d’autre recours que d’interpeller les autorités. Chose qui fut faite. Lors de son passage à Djidjan-Loulo, pendant la campagne électorale, IBK aurait promis de faire retirer les tuyaux s’il était élu. 12 mois plus tard, ils sont toujours là. Des émissaires du village n’ont pas manqué, lors du forum des orpailleurs tenu à Bamako du 18 au 21 septembre 2014, d’interpeller le président IBK sur le danger qui planait sur leur localité. En, vain. Aujourd’hui, les habitants envisagent un ultime recours: s’attaquer aux installations de la mine, même si mort doit s’ensuivre car, pour eux, ils sont déjà morts.

Tuyau percé


Pèlerinage 2014 aux lieux saints de l’Islam : Les raisons de l’interdiction des vols charters

Le pèlerinage aux lieux saints de l’islam suscite, cette année, de sérieux remous au Mali. Alors qu’auparavant, toutes les agences de voyages privées cherchaient des clients et des visas puis affrétaient des vols pour l’Arabie saoudite, les autorités saoudiennes ont, en 2014, introduit une nouveauté : elles ont exigé des pays d’Afrique subsaharienne (Mali, Niger, Burkina Faso, etc.) de repartir leurs pèlerins entre la compagnie saoudienne « NASAIR » et leur compagnie aérienne locale. Dans l’hypothèse où un de ces pays, comme c’est le cas du Mali, ne possède pas de compagnie aérienne nationale susceptible d’assurer le transport des pèlerins, ces derniers devront obligatoirement emprunter un vol de « NASAIR », une compagnie aérienne saoudienne. C’est ainsi que l’Autorité Générale de l’Aviation Civile saoudienne a, par lettre du 29 mai 2014 signée du capitaine Mohammed Ali Jamjoom, fait savoir à la direction de l’Aviation Civile du Mali qu’aucune autre compagnie que « NASAIR » (en anglais « FLYNAS ») ne sera autorisée à transporter des pèlerins à partir du sol malien. L’Autorité Générale a réitéré sa mise en garde à travers une lettre du 17 juin 2014.

 

Les pèlerins qui ne souffriront pas de la mesure saoudienne

 

La mesure de restriction ne nuit pas aux pèlerins de la filière gouvernementale. En effet, ceux-ci, au nombre 1.000, sont confiés à « NASAIR » car cette compagnie a remporté l’appel d’offres public lancé par l’Etat malien pour 1,37 milliard de FCFA, montant légèrement inférieur à celui de l’an passé où « NASAIR » a obtenu le même marché pour 1,39 milliard de FCFA.
En 2014, « NASAIR » a été choisie par le gouvernement au dépens de son unique concurrent, le groupement « AMSA-MAXI AIR LTD ». Pour plusieurs raisons. D’abord, « NASAIR » a de l’expérience : elle a pu produire devant la commission de dépouillement des offres plusieurs certificats de bonnes exécutions délivrées, entre autres, par les gouvernements nigérien, burkinabè, indien et ivoirien pour avoir transporté avec succès les pèlerins de ces pays en Arabie Saoudite. Ensuite, « NASAIR » a présenté des documents techniques et administratifs parfaitement en règle. A l’inverse, le groupement « AMSA-MAXI AIR LTD » a multiplié les insuffisances : il n’a pu fournir à la commission ni un plan de vol conforme au délai d’exécution, ni un agrément officiel, ni une autorisation d’atterrissage en règle, ni des assurances sur les capacités d’accueil des pèlerins, ni un certificat de non-faillite. C’est pourquoi, malgré ses tarifs relativement compétitifs, le groupement a été écarté, le gouvernement doutant de son aptitude technique à transporter les pèlerins. Car l’objectif majeur du gouvernement reste de confier les voyageurs à une compagnie fiable qui présente toutes les garanties de bonne exécution du marché.
Les pèlerins enregistrés à l’agence de voyages « Al-Madina » ne seront pas, eux non plus, victimes de la directive saoudienne. De fait, cette agence n’est autre que la représentante de la compagnie « NASAIR » au Mali: ses clients voyagent donc tout naturellement par « NASAIR ». Le sachant, de nombreuses agences de voyages, pour ne pas pénaliser leurs clients, s’activent à les confier à « Al-Madina ». Il s’agit notamment des agences AMASER (165 pèlerins), Al-MOUSTOUR (170 pèlerins), Al-HIJRA (125 pèlerins), Al-MAWADA (430 pèlerins), KASO VOYAGES (260 pèlerins), KOUREKAMA (105 pèlerins), KUMBI VOYAGES (550 pèlerins) et WAGADOU (200 pèlerins).

 

Les pèlerins menacés par la mesure
Par contre, le groupement « AMSA-MAXI AIR LTD » caresse le rêve de convaincre les autorités saoudiennes de lui octroyer une autorisation spéciale. Lors d’une conférence de presse tenue le jeudi 14 août 2014, le représentant du groupement, Boucary Sidibé dit Kolon, a ainsi déclaré que « NASAIR n’a pas l’exclusivité du transport des pèlerins » et que son groupement, qui compte 2.800 clients, les transportera sans faute en Arabie Saoudite. Sidibé souligne que les Saoudiens ont incité les pays qui ne possèdent pas une compagnie nationale d’opter pour « NASAIR » mais qu’il ne s’agit pas là d’une interdiction des autres compagnies ou agences.

 

L’ambassadeur saoudien confirme l’interdiction

 

Pour en avoir le cœur net, nous avons sollicité un entretien de l’ambassadeur du royaume d’Arabie Saoudite au Mali, Nahidh Al-Harbi. Le diplomate nous a reçu en ses bureaux sis à l’ACI 2000, Bamako, le jeudi 14 août 2014, en présence de son interprète, monsieur Kébé. Al-Harbi a d’abord tenu à nous remercier d’avoir fait le déplacement pour comprendre la décision des autorités du royaume en ce qui concerne le pèlerinage de cette année. Selon l’ambassadeur, les agences de voyages, avant de transporter leurs pèlerins aux lieux saints, passent des contrats d’hébergement en Arabie Saoudite. Munies de ces contrats de bail, elles se présentent à l’ambassade saoudienne avec les passeports des pèlerins sur lesquels l’ambassade appose des visas. Cette année, précise l’ambassadeur, le royaume saoudien a décidé que tout pays qui ne possède pas une compagnie aérienne nationale doit confier ses pèlerins à la compagnie saoudienne « NASAIR ». Le diplomate souligne : « La mesure ne concerne pas seulement le Mali ni l’Afrique subsaharienne; elle vaut pour le monde entier! ».
Et pourquoi cette mesure aux allures discriminatoires ? Réponse d’Al-Harbi: « La mesure a pour but de soulager les pèlerins. Il a été constaté que les agences de voyages, pour le transport des pèlerins, louent des vols charters. Après le pèlerinage, les compagnies charters restent introuvables et les pèlerins sont abandonnés avec leurs bagages à l’aéroport de Djeddah pendant plusieurs semaines. Non seulement les pèlerins vivent alors le calvaire, mais en outre, leur présence à l’aéroport occasionne des désagréments énormes pour les travailleurs et les autres usagers. En donnant aux compagnies nationales et à NASAIR le monopole du transport des pèlerins, les autorités saoudiennes veulent se donner des interlocuteurs crédibles et connus; elles sauront à qui s’adresser pour le rapatriement des pèlerins dans leur pays d’origine et cela, dans les délais requis. Avant cette nouvelle mesure, les autorités saoudiennes ne savaient pas à qui s’adresser pour le retour rapide des pèlerins car elles ne connaissaient pas les compagnies charters ni l’identité des agences qui les avaient affrétées. ». Conclusion de l’ambassadeur: « En définitive, pour accomplir le pèlerinage cette année, les pèlerins devront passer soit par « NASAIR », soit par des compagnies nationales. Mais même les compagnies nationales ne peuvent transporter des pèlerins non-nationaux en Arabie Saoudite ».
Il reste toutefois la possibilité pour les pèlerins d’emprunter les vols réguliers de compagnies desservant ordinairement l’Arabie Saoudite (Air France, Royal Air Maroc, Ethiopian Airlines, etc. Le problème, c’est qu’aucune agence n’a la possibilité financière de louer les avions de ces compagnies, à moins de le faire à perte. En tout état de cause, il importe que tous les pèlerins soient informés, à temps, des périls qui guettent. Là-dessus, le gouvernement malien a tort de se taire.
Silence gouvernemental
Joint par nos soins, un haut responsable de la direction de l’Aviation Civile malienne reconnaît que le service a bien reçu la directive saoudienne mais considère qu’elle est illégale: « C’est une mesure protectionniste qui viole les conventions internationales ». Problème: pour faire annuler cette mesure, il faudrait une longue procédure devant l’Organisation Mondiale du Commerce ou des négociations bilatérales entre le Mali et le royaume saoudien. Dans l’intervalle, que deviennent les pèlerins maliens de 2014 ?

Vols Charter

 

 


Mali : Silence, la « Somilo » pollue de nouveau

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 La société minière de Loulo ( Somilo) semble passée maître dans la création de situations explosives. Après avoir été à la base du drame que la localité de Loulo, région de Kayes, a connu le 10 juillet 2009, la société minière fait encore parler d’elle, cette fois du côté de la localité de Djidjan. Si à Loulo, le problème était lié à une grogne des travailleurs, à Djidjan la bombe est d’ordre environnemental.

En effet, dans le cadre du traitement des minerais, certains produits très mortels comme le cyanure et le plomb sont utilisés dans les mines. A la fin de la chaîne de traitement, ces produits passent par un tuyau vers un déversoir final. A Djidjan, les tuyaux par lesquels passent les produits toxiques traversent le village à travers un canal. Aujourd’hui, la population de la localité est victime d’une pollution des cours d’eau et de l’air causée par les explosions régulières des tuyaux.

Face au manque de système d’adduction d’eau potable, les habitants et les animaux n’ont pour leurs besoins, recours qu’à l’eau de la seule rivière qui traverse le village. Les enfants risquent leur vie tous les jours en jouant dans le canal qui loge les tuyaux. Selon Moussa Coulibaly, un habitant que nous avons interrogé, lorsque la chaleur du cyanure vous frappe, vous vous retrouvez contaminé; et lorsqu’une goutte de cyanure vous touche, c’est la mort assurée. Il suffit de faire un tour du côté de Djidjan pour constater que la majeure partie de la population souffre de maux de ventre chroniques accompagnés de diarrhées.

Arrêter la catastrophe

La population, ayant interpellé les responsables de la mine sur la question, apprendra de ceux-ci que la société paye une taxe environnementale auprès des autorités nationales. Ne se sentant pas concernée par cette taxe, la population a continué à faire pression sur les responsables de la mine, notamment son directeur, Siaka Berthé. Ce dernier aurait demandé la démolition des concessions situées à proximité des tuyaux sans, au préalable, indemniser les propriétaires.

Les habitants sont décidés à s’opposer à cette mesure pour la simple raison qu’ils étaient là avant l’implantation de l’usine minière. Dans le souci de mettre fin à ce qu’il considère comme une extermination programmée, tout le village souhaite le déplacement des tuyaux. Pour cela, la communauté de Djidjan, dans une correspondance en date du 20 juillet 2014 adressée aux autorités locales, régionales et nationales, exige que des dispositions soient prises pour arrêter la catastrophe.
La direction de la Somilo qui a reçu une copie de la lettre n’a pas encore réagi. Bizarre, tout de même, que la Somilo soit à la base de cette pollution géante de l’environnement quand on sait que son directeur, dans une récente interview accordée à un journal de la place, affirmait que sa société détenait une certification ISO et est inscrite en bourse. Elle devrait donc en principe respecter la réglementation en matière de sécurité et de protection de l’environnement. Les photos que nous avons pu prendre illustrent, en tout cas, à souhait le mal quotidien infligé aux pauvres habitants de Djidjan.


De la démocratie en pays pauvre et illettré

La pauvreté et l’analphabétisme empêchent la plante démocratique de croître, même si on l’arrose matin et soir. Un éminent homme l’avait dit il y a 20 ans.

L’ancien président français, Jacques Chirac, a déclaré que l’Afrique n’était pas mûre pour la démocratie. Les opposants africains l’ont soupçonné de sympathie avec les dictateurs du continent. L’histoire donne aujourd’hui raison à Chirac. Depuis 1992, les Maliens pratiquent la démocratie sans savoir ce que c’est.

 

Pour nombre de Maliens, démocratie signifie anarchie. Un régime où chacun fait ce que bon lui semble. Demandez aux gens de Yerewolo Ton (ceux qui ont agressé le président Dioncounda Traoré): ils vous diront qu’en démocratie, la personne d’un chef de l’Etat, surtout intérimaire, n’a rien de sacré et mérite une copieuse bastonnade. Les courtisans et des laquais du chef, pensent que le chef a tous les droits, que les opposants du chef ont tous les devoirs et que quiconque  critique le chef ne peut être qu’un apatride. Beaucoup estiment qu’en démocratie, seule la victoire électorale compte, quels que soient les moyens employés.

 

A leur entendement, les voix des électeurs s’achètent comme au marché: il suffit, pour cela, de distribuer à tour de bras des sacs de mil ou de poster non loin du centre de vote un marchand de  voix muni d’espèces sonnantes et trébuchantes. Ceux qu’on appelle « notables », les chefs de villages et consorts, ont fort bien compris le système : sachant qu’aucun candidat ne repassera les voir après le scrutin, ils reçoivent tous les candidats avec les mêmes tambours, empochent le traditionnel « prix de cola » (entendez les pagnes et les ballons de campagne) et…boudent les urnes ! Résultat : depuis 1992, le taux de participation électorale n’a jamais atteint 39%. Chez nous, il existe aussi un troisième tour des élections; elle se joue devant la Cour Constitutionnelle, cette très auguste juridiction qui, sans se soucier de ce que les Maliens ont voté sous un soleil ardent, a l’habitude d’annuler des milliers de voix avant de désigner le candidat de son choix.

 

Dans ce contexte de démocratie où tout marchand de cola a sa propre interprétation des lois, il ne sert à rien de pondre des programmes. Les électeurs, majoritairement analphabètes, ont besoin de thé, pas de paperasses. Voilà pourquoi les programmes finissent à la poubelle ou entre les mains des vendeuses de beignets. De toute façon, les promesses contenues dans ces programmes-là n’engagent personne, pas même leurs brillants auteurs, puisque nul ne sait où trouver l’argent nécessaire au financement des milliers de ponts, de routes, d’écoles et de dispensaires promis.


De la démocratie en pays pauvre et illettré

La pauvreté et l’analphabétisme empêchent la plante démocratique de croître, même si on l’arrose matin et soir. Un éminent homme l’avait dit il y a 20 ans.

L’ancien président français, Jacques Chirac, a déclaré que l’Afrique n’était pas mûre pour la démocratie. Les opposants africains l’ont soupçonné de sympathie avec les dictateurs du continent. L’histoire donne aujourd’hui raison à Chirac. Depuis 1992, les Maliens pratiquent la démocratie sans savoir ce que c’est.

 

Pour nombre de Maliens, démocratie signifie anarchie. Un régime où chacun fait ce que bon lui semble. Demandez aux gens de Yerewolo Ton (ceux qui ont agressé le président Dioncounda Traoré): ils vous diront qu’en démocratie, la personne d’un chef de l’Etat, surtout intérimaire, n’a rien de sacré et mérite une copieuse bastonnade. Les courtisans et des laquais du chef, pensent que le chef a tous les droits, que les opposants du chef ont tous les devoirs et que quiconque  critique le chef ne peut être qu’un apatride. Beaucoup estiment qu’en démocratie, seule la victoire électorale compte, quels que soient les moyens employés.

 

A leur entendement, les voix des électeurs s’achètent comme au marché: il suffit, pour cela, de distribuer à tour de bras des sacs de mil ou de poster non loin du centre de vote un marchand de  voix muni d’espèces sonnantes et trébuchantes. Ceux qu’on appelle « notables », les chefs de villages et consorts, ont fort bien compris le système : sachant qu’aucun candidat ne repassera les voir après le scrutin, ils reçoivent tous les candidats avec les mêmes tambours, empochent le traditionnel « prix de cola » (entendez les pagnes et les ballons de campagne) et…boudent les urnes ! Résultat : depuis 1992, le taux de participation électorale n’a jamais atteint 39%. Chez nous, il existe aussi un troisième tour des élections; elle se joue devant la Cour Constitutionnelle, cette très auguste juridiction qui, sans se soucier de ce que les Maliens ont voté sous un soleil ardent, a l’habitude d’annuler des milliers de voix avant de désigner le candidat de son choix.

 

Dans ce contexte de démocratie où tout marchand de cola a sa propre interprétation des lois, il ne sert à rien de pondre des programmes. Les électeurs, majoritairement analphabètes, ont besoin de thé, pas de paperasses. Voilà pourquoi les programmes finissent à la poubelle ou entre les mains des vendeuses de beignets. De toute façon, les promesses contenues dans ces programmes-là n’engagent personne, pas même leurs brillants auteurs, puisque nul ne sait où trouver l’argent nécessaire au financement des milliers de ponts, de routes, d’écoles et de dispensaires promis.dessin caricature


BACCALAUREAT MALIEN 2014 : Le grand cafouillage

Les examens du baccalauréat malien se sont déroulés du 10 au 13 juin 2014. Après un diplôme d’études fondamentales entaché de fraudes, on espérait voir un bac moins frauduleux. C’est raté. En effet, jamais dans l’histoire du Mali, on n’assista à des examens plus chaotiques.

 

Le mardi 10 juin, premier jour des examens du bac, les candidats et surveillants, dès 6 heures du matin, prennent d’assaut les centres où ils sont affectés. A 7 heures et demie, les surveillants, constatant l’absence des présidents de centres, commencent à se poser des questions. Traditionnellement, les chefs de centres sont présents à 6 h 30 et les candidats installés dès 7 h 15 . A 8 h, candidats et surveillants apprennent que les sujets ont fait l’objet de fuites massives et que le département de l’éducation nationale a décidé de les changer pour éviter un scandale similaire à celui du DEF. Tout le monde s’attend donc à un report des épreuves.

 

Mais les chefs de centres se présentent à 11 h avec des sujets. Prévus pour commencer à 8 h, les épreuves démarrent ainsi à 11 h 30. On n’est toutefois pas au bout des surprises. Quelques heures après le démarrage des épreuves dans certains centres, les candidats de la série Langue et Littérature (LL) se voient retirer leur sujet au motif qu’il s’agissait de sujets du niveau de la 9ème année du fondamental et non de la terminale du lycée ! Le cas arrive, par exemple, au « Lycée du Progrès » de Faladié.

 

Effectivement, on ne soumet pas à des lycéens de « LLT » un sujet de littérature comme: « Un parent revient de voyage; racontez. ». Ou encore ce sujet: « Conjuguez le verbe entendre au passé composé de l’indicatif ». Dans d’autres centres comme celui du Lycée de Niamana, les candidats poursuivent les épreuves avec le sujet qui vient d’être annulé ailleurs. Pour ne rien arranger, les candidats arabophones sont oubliés: on ne leur propose aucun sujet ainsi que cela est constaté au « Lycée Mabilé ». Au centre de Kalanban, les candidats auront les sujets si tardivement qu’ils ne termineront le traitement  qu’à 22 heures, s’éclairant de bougies et de lampes.

 

Après cette journée-marathon du mardi 10 juin 2014, rendez-vous est pris pour le mercredi 11 juin pour de nouvelles épreuves. Mercredi matin, candidats et surveillants attendent  jusqu’à 9 h 30 les sujets. Quand les sujets arrivent enfin dans les centres, les candidats de la série « Sciences Sociales » reçoivent, non pas les sujets de géographie attendus, mais plutôt des sujets d’anglais. Le comble, c’est que ces sujets d’anglais étaient destinés aux candidats de la série « LLT » ! Ces derniers, au lieu de sujets de mathématiques, reçoivent à leur tour des sujets de géographie.

 

Devant le tollé suscité par ce cafouillage,  le chef du centre « Mabilé » récupère les sujets et fonce sur l’académie, chargée de l’organisation des examens. C’est là qu’on lui remet les vrais sujets qu’il transporte aussitôt au centre. Il n’est pas, hélas!, au bout de ses peines : les sujets qu’il transporte ne sont pas mis dans des enveloppes cachetées, ce qui viole leur secret ainsi que la loi, laquelle, déclare nul tout sujet non scellé. Conséquence: des fuites massives car les candidats auxquels sont remis les sujets les communiquent à d’autres qui, par erreur, avaient reçu des sujets différents qu’on s’apprêtait à changer.

Autre facette de la désorganisation générale: jeudi, à 8 heures, les épreuves de sociologie commencent au centre « Mabilé ».

 

Les candidats inscrits en « sciences sociales » reçoivent des sujets dont le suivant: « le fonctionnement de la famille malienne ». Mais les questions à répondre portent plutôt sur « la famille chinoise ». Qu’est-ce que la Chine vient chercher dans cette histoire ? Et quel étudiant malien sait quelque chose des Chinois alors qu’ils ne figurent pas au programme scolaire ?

Le désordre est tel que le bruit d’une reprise intégrale du bac court la ville. Le hic, c’est que le ministre des Finances s’y serait opposé en raison des contraintes financières que connaît l’Etat.

 

Interpellée, mardi 10 juin par le parlement, Madame Togola Jacqueline Nana, ministre de l’éducation a vertement dénoncé les magouilles en cours dans les écoles privées dont certains promoteurs feraient de la fraude et des notes complaisantes leur fonds de commerce. Ces promoteurs, aux dires de la ministre, font tout pour que leurs écoles soient retenues comme centres d’examens afin de s’y adonner à leurs sales besognes. La ministre a même brandi devant les députés des enregistrements mis à sa disposition par « Orange-Mali S.A », enregistrements où l’on entend des fraudeurs demander: « La sauce est-elle prête ? ». Et l’interlocuteur répond: « Elle sera prête dans l’heure! ». Du coup, la ministre annonce des poursuites judiciaires…En attendant, on peut se demander qui passera aux examens et ce que vaudront les résultats.

 

Photo Bacheliers


Mali : la Minusma décriée par la population à Gao

soldat-minusmaSuite à l’intervention militaire française en cours depuis janvier 2012, le Conseil de sécurité des Nations unies , par une résolution n° 2100 du 25 avril 2013,a créé la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations unies pour la stabilisation au Mali (Minusma).

La Minusma, composée pour l’heure de quelque 6 000 hommes, est déployée dans les principales villes du Nord et dans la capitale du Mali. Elle a pour mission, entre autres, d’aider les autorités maliennes à stabiliser le pays en accordant une attention prioritaire aux principales agglomérations, aux axes de communication, à la protection des populations civiles, à la situation des droits de l’homme. La force de l’ONU  a aussi en charge la mise en place des conditions indispensables à l’acheminement de l’aide humanitaire, au retour des déplacés, à l’extension de l’autorité de l’État, au rétablissement de l’autorité de l’État dans tout le pays. Elle travaille enfin à écarter les menaces sécuritaires et à prévenir tout retour d’éléments armés dans les zones où elle opère.

Depuis leur déploiement, les soldats de la Minusma, en lieu et place de leur mission de sécurisation du territoire et des citoyens, s’adonnent à d’autres pratiques, surtout dans les localités du Nord. A Gao, par exemple, les populations déçues du comportement des soldats commencent à hausser le ton et les griefs contre la force sont nombreux. Tout d’abord, retranchés dans un hôtel de la ville, les soldats onusiens ne se donnent aucune espèce de peine : seules les forces de défense et de sécurité du Mali et celles de l’opération Serval effectuent des patrouilles sur le terrain. « L’activité principale des soldats de la Minusma consiste à faire du commerce et à courir derrière les jeunes filles de Gao », nous explique, plein de colère, un notable de la localité. Bénéficiant de grands stocks d’eau minérale, plusieurs soldats en cèdent régulièrement de pleins cartons aux commerçants de Gao et de la ville voisine de Gossi. Le prix du carton est de 1 750 F Cfa. A ce train, une bonne partie du budget alimentaire de la Minusma finira sur les marchés et dans les foires au lieu de désaltérer d’illustres combattants antijihadistes !

Quant au second point d’accusation, qui concerne la chasse aux demoiselles de Gao, il irrite au plus haut point les populations locales. « Les soldats de la Minusma sont devenus les champions dans la drague aux filles, s’indigne l’une de nos sources. Depuis leur arrivée à Gao, le chiffre d’affaires des vendeurs de motos Jakarta a pris l’ascenseur. D’innombrables filles, même celles issues de familles démunies, se sont procuré des motos Jakarta. Cette subite prolifération de motos toutes neuves dans une ville où la crise sécuritaire se fait encore sentir a poussé les chefs de famille à chercher à comprendre. On a ainsi appris que ces motos sont tout simplement achetées par ces filles avec l’argent gagné à l’occasion de leurs relations intimes avec des soldats de la force de l’ONU . »

Agacées par le comportement sexuel des soldats, les populations de Gao affublent désormais la Minusma du sobriquet d’« amusement ». Elles viennent d’ailleurs de découvrir un nouveau fait grave: une vidéo où l’on voit deux filles en plein rapport sexuel avec un soldat de la force circule, depuis quelques jours, dans la ville. Les deux jeunes filles, élèves du lycée Yana Maiga de Gao, ne semblent pas en faire un problème et se rendent sans remords à l’école, malgré les moqueries de leurs camarades. Indignés par ce qui semble être la goutte d’eau qui fait déborder le vase, certains journalistes de la cité n’ont pas manqué de passer en boucle une émission appelant les responsables de la Minusma à sévir contre leurs agents fautifs. Pour l’instant, aucun commentaire ne vient du côté du quartier général de la Minusma.

 A Gao, personne ne veut plus de la force de l’ONU; une grande manifestation populaire est même en préparation dans les jours prochains pour exiger son départ pur et simple de la ville. Selon, D. Maiga, enseignant, à Gao, « la présence des soldats de la Minusma ne sert à rien, car les attentats perpétrés à Gao après la libération ont eu lieu à leur nez et à leur barbe; ils étaient sans doute calfeutrés avec les jeunes filles de Gao. » Pour madame Touré Youma, résidente de Gao, « la Minusma, qu’on le veuille ou non, échouera à Gao, comme toute les autres forces onusiennes à travers le monde. » Pour l’instant, ce qui inquiète le plus à Gao, c’est le risque de propagation des infections sexuellement transmissibles.

 


Négociations Gouvernement – Groupes armés: Pourquoi IBK doit négocier

marche de protestation à Tombouctou

Fidèle à la ligne de conduite qu’il s’est toujours imposé, le Président de la République, Ibrahim Boubacar Keïta n’a jamais fait de mystère sur ses intentions de ne point prendre langue avec des bandes armées sur le territoire. Une position quasi tranchée qui l’honore non seulement en tant que patriote malien tout court, mais surtout en sa qualité d’homme d’état. Mais une analyse froide et stratégique de cette volonté de refondation de la République à partir des principes de séparation des pouvoirs, de justice sociale, d’une gouvernance sobre, efficace et vertueuse et de l’état de droit du Chef de l’État, démontre qu’il y a lieu de remplacer les ingrédients qui sont en place pour que la crise au Nord ne se prolonge pas dans la durée.

Que l’on commence les pourparlers avec les groupes en armes ou pas, importe peu. L’essentiel est que l’on aille à la table de négociation pour discuter sans préalable, sans à priori inutile avec le seul souci constant qui est celui de préserver le Mali des soubresauts qui ailleurs, ont déconstruit des nations et hypothéqué dangereusement ou durablement leur devenir.
Certes, tout dépendra dans une large mesure de la manière dont le processus de négociations va se dérouler. Il devra être exempt de perversions de nature à vicier le retour durable de la sécurité, la stabilité et la paix.
Dans ce cadre, il est primordial que les médiateurs jouent leur rôle en se postant à équidistance de toutes les coteries, n’ayant à cœur que de prôné l’intégrité, la sécurité et le développement de la République du Mali et elle seule.

Il faudra y apporter le traitement qu’elle nécessitera. Avec un seul impératif : les intérêts du Mali. Dans le secret des négociations et dans l’intimité de notre conscience, il ne devrait y avoir qu’un seul vainqueur : le Mali, un patrimoine à tous les Maliens. Par conséquent, il serait souhaitable que l’on commence le processus par son milieu, en effectuant le cantonnement, puis ensuite procéder au désarmement et à la réinsertion.

L’aboutissement des différents accords de paix a démontré que même si l’on impose à ces groupes le désarmement, ils n’apporteront lors de la collecte que des armes usées, après avoir enfoui dans des caches l’armement de pointe.
Pour les partenaires et amis du Mali, qui sont venus lui prêter main forte, en guise de soutien au retour de la paix, il est important qu’il reste démocratique. Il est important qu’il reste stable, il est aussi important que tous ses dirigeants soient à la hauteur de l’esprit et de la lettre de la constitution et travaillent sous et au nom du peuple du Mali. Il faudrait surtout qu’il aide son peuple à conserver ce capital précieux dans la paix et la stabilité.
Il reste à construire une culture de paix fondée sur le discours de la solidarité, également sur la vérité et la justice, l’éthique et la morale.